Pratiques paisibles - 1 |
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Je pense entreprendre une petite série de réflexions sur les Pratiques paisibles, chapitre XIV du Sutra du Lotus.
Quatre de ces pratiques le sont au sens propre (shin anrakugyo): pratique de la bouche (ku anrakugyo), pratique de l’esprit (i anrakugyo), pratique du vœu (seigon anrakugyo). Anrakugyo signifie pratique paisible ou commode ou encore aisée. Au cours des prochaines semaines, je vous encourage à étudier avec moi ces pratiques que le Bouddha enseigne à ceux qui souhaitent exposer le Sutra à notre époque. Cette série sera mise en ligne tous les mardis de février. Ma motivation est double. Tout d’abord, il est bon de relire de temps en temps ces passages. La dernière fois que j’en ai parlé, c’était l’année dernière lors de la préparation de mes conférences sur le Sutra du Lotus. |
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La première pratique paisible est celle du corps. Dans la traduction française de Jean-Noël Robert (éd. Fayard – Rissho Kosei-Kai 1997), le chapitre commence p. 247. [N.d.T. Le Rév. Ryusho utilise la version anglaise de Murano. Tout en suivant, quand c'est possible, la traduction de M. Robert, nous nous en écartons pour être cohérents avec le commentaire du Rév. Ryusho]. Cette première pratique porte principalement sur les comportements physiques, biens qu’ils empiètent parfois sur la pratique de l’esprit. La liste des attitudes favorables à la pratique commence par la recommandation d’être « patient, gentil, doux et réfléchi, ne pas être timoré, n'être attaché à rien». À première vue, cela peut paraitre incohérent car d’un côté on doit être gentil et d’un autre ne pas être timoré, quoique les deux définitions aient certains points communs. Je pense que gentil signifie humble et affable et que ce n'est pas un terme méprisant. Associée à patient et doux, l’image est celle d'une personne qui ne met pas son interlocuteur mal à l’aise en attirant indûment l'attention ou qui pousse les autres à se comparer à elle. Être patient c’est aussi faire preuve d’altruisme et se dépouiller de l’arrogance qui consiste à voir les défauts de l’autre en ignorant les mêmes défauts en soi. Tout le monde peut avoir son mauvais jour ou même une série de mauvais jours, vous le savez bien, et quand cela vous arrive vous espérez que les autres seront indulgents à votre égard. Vous devez donc être indulgent pour les autres. L’humilité et la patience vont bien ensemble. La plupart du temps, l’impatience implique que l’on se sent meilleur que l’autre ou tout au moins qu’on voudrait l’être. Réfléchissez bien à cela. Lorsque nous sommes impatients avec un conducteur trop lent, c’est que nous pensons : « moi, je ne traine jamais autant ». Il est rare que nous fassions preuve de patience avec un trainard au volant en pensant : « j’espère qu’il va trouver ce qu’il cherche » ou bien « dommage qu'il se soit perdu » ou bien encore : « il a peut-être peur de conduire, comment faire pour ne pas le perturber davantage par ma conduite ? ». Ces pensées vous paraissent étranges, n’est-ce pas ? Comme il est difficile de faire passer les besoins d’un autre avant les siens ! Certains ne trouveront pas du tout paisible cette pratique, surtout si l’on a l’habitude de toujours suivre son propre chemin. Cela vaudrait pourtant la peine de reconsidérer l’importance que nous accordons aux besoins des autres par rapport à nos propres besoins. Une autre pratique, que j’aime particulièrement, est de ne pas être attaché à nos "détachements". Il s'agit d'un travers propre aux bien-pensants, ceux qui s’estiment supérieurs aux autres parce qu'ils pensent — ou font quelque chose — que d'autres ne font pas, et que cela devient une arme contre les autres. Les bouddhistes y succombent tout autant que les pratiquants d’autres religions. Chaque fois que nous viennent des pensées de supériorité à cause de nos actions ou de nos croyances, nous sommes en réalité attachés à notre "détachement". On peut être attaché aux pseudo-vertus : à ne pas manger de viande, ou à méditer, ou à rendre service, ou au nombre d'années de pratique. Il y a tant de choses auxquelles nous pouvons être attachés ! Dans ces cas, la pratique bouddhique devient une arme agressive et non pas un outil de développement personnel. Vient ensuite à une longue liste de personnes et de lieux à éviter. Je pense que certains points sont des faits culturels acquis à l’époque de la rédaction du Sutra. L’idée générale est d’éviter des situations qui nous poussent à agir de manière inappropriée pour un bouddhiste. Les désagréments de fréquenter des lieux inappropriés sont de deux sortes : d'abord c'est qu'ils induisent en tentation de mal se conduire et, ensuite, c'est le risque de s'attirer une mauvaise réputation, même si nous ne faisons rien de mal. Quel sera le message que notre présence en ces lieux enverra aux autres ? Ainsi, en dernière analyse, la première pratique paisible est une méthode pour cultiver notre façon d’être au monde en se montrant aussi concernés par les autres que par nous-mêmes, une manière d’être qui reflète à l’extérieur notre attitude intérieure et qui n’accorde pas de valeur aux futilités. Ainsi nous pourrons être en paix non seulement avec nous-mêmes mais avec tout ce qui existe ou qui se produit autour de nous. Read more about Peaceful Practices #1 – February 4, 2014 Meditation | Nichiren Shu Buddhism Blog by Ryusho龍昇 on: |
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